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Socioculturel Yves Conrardy

« On a tout à gagner à collaborer avec des gens qui maîtrisent leur sujet. »
© Eric Engel

Un battle hip hop, une exposition photo sur le féminicide, un film sur une icône de l’architecture, une soirée de slam… Ces événements ont un point commun : leurs organisateur∙rice∙s ont frappé à la porte de notre programmateur socioculturel et événementiel, Yves Conrardy. Et il est bien content.

Yves, le volet Socioculturel touche à des thématiques très différentes et propose des formats d’événement variés. Ce serait presque impossible de proposer tout ça sans collaborer avec des partenaires, non?

Les collaborations sont la pierre angulaire du volet Socioculturel et c’est ce que j’essaie de toujours mettre en avant. On reproche parfois aux Rotondes de ne pas faire ce travail de fond elles-mêmes. Mais on explore tellement de thématiques différentes, on ne peut pas être spécialiste dans tout. Il faut être réaliste : si on se lançait dans tous les thèmes nous-mêmes, le travail serait forcément moins bien fait. Il y a plein de gens qui maîtrisent leur sujet et on a tout à gagner à collaborer avec eux.

Justement, quel est le rôle des Rotondes lors de ces événements?

Ça dépend des projets mais dans tous les cas, on propose un espace adapté, à des conditions avantageuses. On apporte une aide logistique, on discute de la mise en place et de l’accueil, on participe à la communication… Quand on débute un cycle d’événements, on voit comment ça se passe et on s’adapte. On va peut-être se désengager de certains aspects en fonction des points forts du partenaire et apporter plus de soutien là où on voit que c’est nécessaire.

On offre aussi un regard extérieur sur le déroulement et le contenu d’une soirée. Ça peut être une simple suggestion de film ou une réflexion plus large. Pour Expressions of Humanity de l’association Time for a Change par exemple, il y a toujours plein de matériel intéressant. Mais au début du cycle, il a bien fallu admettre que proposer un film et/​ou une discussion et/​ou une exposition et/​ou la présentation d’un livre, etc., ça faisait beaucoup à caser dans un événement de 2 heures et surtout, ça faisait trop d’informations à digérer pour le public. Donc on a réfléchi à comment simplifier le déroulé sans rien perdre du message.

Il y a des collaborations qui sont en place depuis pas mal d’années. Quel est le secret d’un partenariat qui dure?

D’abord et très simplement, il faut que les deux parties aient envie qu’il continue ! Et il faut qu’on continue de partager la même ligne. Un exemple de collaboration qui dure, c’est celle avec queer loox. Le cycle fête déjà ses 10 ans ! Il a été lancé au CarréRotondes par une autre équipe, c’est une deuxième génération qui s’occupe de la programmation actuelle. À l’époque, ce n’était pas un thème évident à présenter alors qu’aujourd’hui, même le Kinepolis a fait un cycle queer. Il y a plus de lieux qu’il y a 10 ans pour accueillir des événements différents, comme on le fait. Le tout, c’est d’offrir le bon lieu au bon partenaire.

Est-ce que tu dirais qu’il y a des thématiques que seules les Rotondes (ou presque) peuvent accueillir?

Pas vraiment, mais il y en a sur lesquelles on est parmi les premiers à s’ouvrir. Les arts urbains sont une forme d’expression et une culture qui ont longtemps été délaissées par les autres institutions et qu’on est content d’avoir intégré à notre programmation il y a quelques années déjà. Aujourd’hui, en plus des workshops de danse et des battles, on encourage nos partenaires à imaginer d’autres événements, comme des conférences, pour mettre en avant l’histoire du mouvement.

J’aimerais aussi continuer à développer une ligne autour du numérique, comme c’est déjà le cas avec le festival Multiplica. Il existe une belle offre pour les jeunes, notamment avec l’option Digital Sciences, sur les cultures numériques, disponible pendant les deux premières années de lycée. Pour les adultes, l’offre est encore fort limitée. L’arrivée de ChatGPT a commencé à faire réfléchir le grand public sur les intelligences artificielles mais il y a encore des conversations à avoir à ce sujet.

Tu es à ce poste depuis 2012. Tu as donc assisté à un paquet d’événements, certains avec des thématiques un peu lourdes. Est-ce que certains t’ont marqué en particulier?

Il y a quelques années, on a eu des soirées qui traitaient du processus de paix au Proche Orient, un sujet que je ne connaissais pas du tout. Sans me rendre plus engagé, travailler sur ces événements et rencontrer des gens impliqués m’a permis de comprendre ce qui est en jeu là-bas. Mais de manière générale, on se rend compte qu’au-delà de l’échange de points de vue, une table ronde a ses limites. La situation reste malheureusement ce qu’elle est et en tant qu’individu, on a assez peu d’emprise dessus. Ce qu’on peut faire, c’est comprendre qu’il y a un problème, et notre programmation socioculturelle a sans doute contribué à de nombreuses prises de consciences sur des sujets très divers. C’est ce que j’espère en tout cas !

En contrepoids, il y a quelque chose qui me plait dans les projets de danse urbaine : c’est toute l’énergie qui est déployée, cette envie de créer sur le moment. Je me rappelle d’un cours d’improvisation de danse pour lequel Knowedge avait invité un prof qui donnait plein d’astuces, qui parlait de création d’une telle manière que ça aurait pu s’adresser aux non-danseurs.

Ce serait idéaliste de parler d’enrichissement personnel?

Parfois, tu apprends beaucoup et parfois, tu tombes dans une certaine routine, comme dans tous les jobs. Mais quand la bonne info, la bonne rencontre tombe pile quand tu en as besoin, il y a un vrai enrichissement. Il vient du fait que je côtoie de nombreuses personnes, dont certaines avec qui je collabore depuis plusieurs années. Ces collaborations sont le fondement de notre programmation et je suis content de les entretenir depuis plus 10 ans.